Un article récent du Financial Times (Alan Beattie, James Boxell, « Lagarde soumise à un régime éthique sévère au FMI », Financial Times, 5 Juillet 2011) décrit de quelle manière la nouvelle Directrice du Fonds Monétaire International (FMI), Christine Lagarde, sera « soumise aux mêmes règles éthiques rehaussées que l’ensemble du personnel du FMI, et devra également subir un entraînement interne », comme une des conditions de son engagement. Selon cet article, par ailleurs très intéressant, ce réquisit apparaît dans une lettre publiée du Bureau Exécutif du FMI à Mme Lagarde. Je me dois de spécifier, à l’orée de ce blog, qu’ayant toujours considéré Mme Lagarde comme une personnalité publique hautement respectée et respectable, les commentaires contenus dans ce blog ne la concerneront en aucun cas directement, pas plus que le FMI.

Pour le dire en une phrase, les règles s’appliquent à tous. Que nous apprend le cas du FMI ? Premièrement, il est inimaginable que ce principe fondamental ne soit formulé qu’aujourd’hui, en 2011. Déontologie et accountability sont au cœur des nouvelles relatives aux secteurs à but lucratif et à but non lucratif depuis des années, et même des décennies. Deuxièmement, bien qu’il vaille toujours mieux résoudre un problème « tard que jamais », cela aurait été fait de façon plus efficace en tant que partie d’un passage en revue régulier et proactif, que dans le sillon de l’affaire DSK (sur laquelle je n’ai aucun commentaire à formuler).

Je ne pourrais pas m’imaginer qu’aucun des conseils d’administration ou des organes consultatifs du secteur à but non lucratif au sein desquels j’ai le privilège de siéger pense autrement. Je ne pourrais m’imaginer aucune entreprise, moins encore aucune entreprise cotée en bourse, qui prendrait officiellement une position différente, ou même qui s’aventurerait à penser différemment à huis clos. Je ne pourrais concevoir aucune institution académique, aucune agence gouvernementale qui suggérerait quoi que ce soit d’autre.

Cependant, si en effet votre organisation fait entendre un autre son de cloche, si elle agit ou se comporte différemment que selon ces principes – que ce soit officiellement ou en privé – il est grand temps de changer, rapidement et radicalement, et ce avec une transparence conséquemment rigoureuse et grâce aux conseils d’un expert indépendant. Il existe des myriades de façons d’évaluer les problèmes éthiques et d’accountability (y compris touchant les finances, ou encore le harcèlement et plus généralement n’importe quelle autre sorte de comportement inconvenant) et plus généralement d’évaluer le respect des principes déontologiques à tous les niveaux de l’organisation. On peut citer entre autres :

1.      L’intégration de ces données dans les évaluations de la performance et de la rémunération à tous les niveaux hiérarchiques ;

2.      La révision régulière des politiques du conseil d’administration pour s’assurer que tous les sujets y ayant trait sont couverts ;

3.       La révision régulière des politiques de gestion des ressources humaines, pour s’assurer que tous les sujets y ayant trait sont couverts ;

4.       La pratique d’audits externes et internes ;

5.      Les discussions ouvertes sur des sujets pertinents, mêlant parfois différents niveaux de hiérarchie (à l’occasion d’un déjeuner du midi, de séminaires, d’une assemblée générale) ;

6.      La révision régulière des politiques et pratiques financières, d’enchères ouvertes, de conflits d’intérêts et autres ; enfin,

7.      Un whistleblower ou un processus de médiation (adapté aux différentes cultures et aux différents systèmes légaux). Je développe régulièrement, pour mes clients individuels, des approches sur mesure dans ces domaines.

20/20 Foresight. Nombre d’entre vous savent qu’un thème récurrent dans mes blogs est celui du 20/20 foresight. Faites face aux difficultés. Mettez en place les politiques, les pratiques et la culture de l’organisation qui vous sont maintenant nécessaires pour pouvoir, à un certain moment dans le futur, regarder en arrière et vous dire que vous avez fait tout ce qu’il était raisonnable de faire pour atteindre aux plus hauts standards et pour couvrir l’ensemble des principes éthiques à mettre en place. Attaquez-vous de même aux apparences d’irrégularités. L’article du Financial Times présente la lettre destinée à Mme Lagarde comme requérant, assez justement, d’éviter « même l’apparence d’irrégularités dans [sa] conduite ».

Enfin, ceci ne signifie pas que salaires et bénéfices doivent être équivalents à tous les niveaux de la hiérarchie. Il y a des processus, ainsi que des procédures de benchmarking pour assurer la maîtrise des rémunérations à tous les niveaux d’une organisation. Dans la plupart des cas les dirigeants se situent plus haut dans la grille de rémunérations, eu égard à leur niveau d’expérience plus élevé, à la charge de travail plus lourde qui leur incombe, à la pression qu’il subissent, à l’ancienneté de leur carrière et, de façon très importante, à leur responsabilité d’être un modèle de respect de toutes les politiques et pratiques, soit éthiques, soit entretenant un quelconque lien avec l’éthique. En effet, une partie de sa rémunération devrait correspondre à la capacité du dirigeant à construire et à développer une culture selon laquelle « les règles s’appliquent à tous ».

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